
La marqueterie est une technique d’ébénisterie et d’ornementation consistant à incruster sur un support (généralement en bois) de fines plaques de matériaux divers (bois précieux, nacre, ivoire, métaux, etc.) afin de créer des motifs décoratifs, figuratifs ou géométriques. Elle repose sur une précision d’exécution exceptionnelle et une maîtrise des contrastes de textures et de couleurs. Elle incarne depuis toujours un artisanat d’art exigeant, recherché par les amateurs de pièces uniques
Histoire de la marqueterie
La marqueterie, technique décorative de placage de bois et d’autres matériaux sur une surface plane, trouve ses origines dans l’Antiquité. Utilisée dès l’Égypte et la Rome antiques, elle se développe en Europe à la Renaissance, notamment en Italie et en Flandre, où les artisans perfectionnent les techniques de découpe et d’assemblage. Sous Louis XIV, grâce à l’influence de Charles André Boulle, elle devient une spécialité française, atteignant son apogée sous Louis XV et Louis XVI.
Avec le mouvement néoclassique, la marqueterie évolue, abandonnant les motifs complexes et baroques pour des dessins plus sobres inspirés de l’Antiquité. Le XIXe siècle marque une nouvelle phase avec l’industrialisation, qui facilite la production, tout en maintenant un artisanat d’exception dans les grandes maisons d’ébénisterie.
La marqueterie : styles et caractéristiques
La marqueterie se distingue par des styles variés selon les époques et les régions.
Matériaux utilisés en marqueterie
Les bois précieux occupent une place centrale dans la marqueterie : amarante, palissandre, acajou, sycomore ou bois de rose sont couramment utilisés. Certains artisans recourent également à des matériaux non ligneux tels que l’ivoire, la nacre, l’étain, l’argent et même la pierre dure.
- La technique Boulle, développée au XVIIe siècle, associe écailles de tortue, laiton et bois pour un effet de contraste saisissant.
- Sous Louis XV, les motifs deviennent plus fluides et organiques, incorporant des arabesques et des volutes typiques du Rococo.
- Avec Louis XVI, le retour au classicisme favorise des compositions géométriques et des motifs empruntés aux décors antiques, tels que les guirlandes et les colonnes.
- Au XIXe siècle, le style Empire privilégie les bois sombres, souvent contrastés avec des incrustations de bronze doré.
- Au XXe siècle, l’Art Déco modernise la marqueterie avec des formes stylisées et l’utilisation de matériaux innovants comme l’ivoire, la nacre et les métaux précieux.
Quelques techniques de marqueterie
Les techniques varient selon les périodes et les artisans.
La découpe au chantourné
Elle permet d’obtenir des motifs précis en superposant plusieurs feuilles de bois avant découpe simultanée.
La technique du « bois brûlé »
Cette technique qui consiste à plonger les pièces dans du sable chaud pour créer des ombres naturelles, est particulièrement prisée sous Louis XVI.
La marqueterie en frisage
Ce procédé repose sur un assemblage minutieux de placages disposés en chevrons ou en éventail, produisant des effets de perspective.
Artistes et ébénistes emblématiques de la marqueterie
Charles André Boulle reste la figure majeure du XVIIe siècle, avec sa technique de marqueterie en laiton et écailles de tortue. Au XVIIIe siècle, Jean-Henri Riesener, ébéniste attitré de Marie-Antoinette, excelle dans la marqueterie de fleurs et de motifs architecturaux. David Roentgen, influencé par le style allemand, produit des meubles aux mécanismes sophistiqués intégrant des placages d’une précision exceptionnelle.
Au XIXe siècle, François Linke renouvelle la marqueterie avec des compositions fastueuses mêlant bois rares et bronze ciselé. Au XXe siècle, Émile-Jacques Ruhlmann modernise l’art du placage avec des lignes épurées et des matériaux novateurs, portant la marqueterie vers le raffinement de l’Art Déco.
La marqueterie, art exigeant nécessitant une précision extrême, demeure un pilier du mobilier d’art. Son évolution au fil des siècles témoigne des goûts et des avancées techniques de chaque époque. Si les artisans d’autrefois privilégiaient des compositions sophistiquées et luxuriantes, les créateurs contemporains explorent aujourd’hui de nouvelles formes et matières, perpétuant un savoir-faire ancestral tout en l’adaptant aux tendances modernes.